Requalification de la friche Sander à Haubourdin (59)
Un site à l’abandon avec un passif environnemental
Cette friche de 25 ha, dont 5 ha exploités, était située dans le périmètre du port fluvial et industriel de Santes, à proximité des captages AEP de l’agglomération Lilloise.
Le site a été exploité à partir de 1870 par des activités d’ennoblissement du textile et notamment de teinture du lin et du coton mais n’a pas pu faire l’objet de travaux complets de remise en état depuis l’arrêt de son activité en 1989 en raison de l’insolvabilité des responsables.
Le liquidateur judiciaire a fait procéder à l’évacuation des déchets et à une démolition partielle des bâtiments. Un diagnostic de la qualité environnementale des sols et des eaux souterraines a également été réalisé par le liquidateur judiciaire.
Les résultats de ce diagnostic montraient une pollution des sols par les métaux et une pollution de la nappe de la craie, localement exploitée pour l’alimentation en eau potable, par les polychlorobiphényls (PCB), constituants caractéristiques des huiles diélectriques des transformateurs. Toutefois la zone d’infiltration des PCB dans les sols n’a pas été retrouvée et l’hypothèse est émise d’un déversement direct dans la nappe par l’intermédiaire d’un puits.
Les injonctions de la préfecture pour des investigations complémentaires ne peuvent être suivies d’effet du fait du caractère impécunieux de la liquidation.
Personne ne souhaite reprendre cette friche du fait des incertitudes quant à l’origine et l’importance de la pollution, tout particulièrement dans un environnement sensible de captages AEP.
Une réhabilitation par l’initiative privée
L’ADEME intervient sur ce site déclaré « orphelin » mais uniquement pour sa mise en sécurité par la pose de clôtures.
En 2006, différents partenaires fédérés par la société EACM, proposent à la préfecture la création d’une société spécifiquement dédiée à la requalification de la friche sous réserve de la vente du bien à son profit.
En mars 2008, après avoir réalisé sur fonds propres des études détaillées de l’extension de la pollution la société ECOFRICHE a présenté à la préfecture un plan de réhabilitation de la partie usine du site. Ce projet a reçu l’approbation de l’ensemble des parties.
Parallèlement, ECOFRICHE a procédé aux travaux de démolition des éléments construits restants qui rendaient le site particulièrement dangereux.
L’équilibre économique de la réhabilitation et son acceptation par la population passait par un changement de vocation de ces terrains pour passer d’un usage industriel à un usage résidentiel, ce qui nécessitait une modification du PLU dont le principe a été accepté par la mairie et la communauté urbaine en 2010.
Une fois le PLU modifié, en 2012, les travaux de requalification ont pu être entamé, comprenant la dépollution du site et son aménagement.
La compensation écologique : pourquoi ? Comment ?
De plus en plus de projets sont confrontés à la présence, sur le territoire envisagé, d’espèces ou d’habitats protégés dont la destruction est interdite par la réglementation. La doctrine européenne prévoit dans ce cas un processus long et complexe de conception et de mise en œuvre des projets. Ce projet ne peut aboutir à la destruction des espèces ou des habitats que de façon exceptionnelle et moyennant la mise en œuvre de processus et de mesures très encadrés.
1.1 Le triptyque réglementaire : « éviter, réduire, compenser »
La note du Ministère de l’environnement (2014) « Éviter, réduire et compenser les impacts sur le milieu naturel », du 16 janvier 2014 précise :
« Dès la conception d’un projet, les questions environnementales doivent être intégrées au même titre que les autres éléments techniques, financiers, etc… »
Cette conception doit tout d’abord s’attacher à éviter les impacts sur l’environnement, y compris au niveau des choix fondamentaux liés au projet (nature du projet, localisation, voire opportunité). Cette phase est essentielle et préalable à toutes les autres actions consistant en second lieu à minimiser les impacts environnementaux des projets, c’est-à-dire à réduire au maximum ses impacts et en dernier lieu, si besoin, à compenser les impacts résiduels négatifs après évitement et réduction.
La séquence « éviter, réduire, compenser » les impacts sur l’environnement concerne l’ensemble des thématiques de l’environnement, et notamment les milieux naturels. Elle s’applique, de manière proportionnée aux enjeux, à tous types de plans, programmes et dans le cadre des procédures administratives de leur autorisation (étude d’impacts ou étude d’incidences thématiques : loi sur l’eau, Natura 2000, espèces protégées, …). »
1.2 La compensation
Les mesures compensatoires sont de la responsabilité du maître d’ouvrage du point de vue de leur définition, de leur mise en œuvre et de leur efficacité. Elles ont pour objet d’apporter une contrepartie aux impacts résiduels négatifs du projet, ou éventuellement résultant d’un cumul avec d’autres projets, qui n’ont pu être évités ou suffisamment réduits.
Elles sont conçues de manière à produire des impacts positifs qui présentent un caractère pérenne et sont mises en œuvre en priorité à proximité géographique et fonctionnelle du site impacté. Elles doivent permettre de maintenir voire d’améliorer la qualité environnementale des milieux naturels. Les mesures compensatoires doivent être :
- au moins équivalentes : elles doivent permettre le rétablissement de la qualité environnementale du milieu naturel impacté, à un niveau au moins équivalent de l’état initial, voire d’obtenir un gain net ;
- réalisables : le maître d’ouvrage doit évaluer la faisabilité technique d’atteinte des objectifs écologiques visés par la mesure compensatoire et s’assurer de la possibilité effective de mettre en place les mesures sur le site ;
- efficaces : les mesures compensatoires doivent être assorties d’objectifs de résultat et de modalités de suivi de leur efficacité et de leurs effets.
L’application des guides UICN et MEDDE pour la démarche « éviter, réduire, compenser » (ERC) encourage vivement et, dans certains cas, exigent une démonstration précise par le pétitionnaire de la capacité technique et scientifique à compenser.
Sont susceptibles d’être soumis à l’obligation de mesures compensatoires tous maîtres d’ouvrage d’infrastructures linéaires ou d’aménagement immobiliers et industriels amenés à altérer des richesses naturelles.
1.3 Principaux problèmes rencontrés par les maîtres d’ouvrage
Au-delà de l’aspect réglementaire et doctrinal, développé ci-dessus, se posent notamment pour les maîtres d’ouvrage plusieurs questions :
- La maîtrise du foncier de compensation sur la durée impartie à la compensation écologique, en général plusieurs dizaines d’années.
- L’engagement dans le temps : comment garantir que les mesures proposées par le maître d’ouvrage, et validées par l’administration, seront effectivement mises en œuvre pendant la durée de la compensation et comment en rendre compte à l’administration.
- La recherche des compétences de développement ou de création d’espaces naturels riches.
La complexité d’évaluation de la richesse écologique des terrains impactés, la construction des mesures compensatoire et la défense de ces mesures vis-à-vis des différents interlocuteurs locaux (DREAL, riverains et autres) sont autant d’étapes complexes entièrement sous la responsabilité du maître d’ouvrage. Le passage par un cabinet d’expert peut être un élément facilitateur pour ce type de projets qui peuvent…